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Bidulex (alias EPE ou EPEX)

Vous avez aimé la fusion ? Vous allez adorer l’EPEX !

déclaration des élu.e.s FSU et CGT au congrès des conseils du 6 mars 2020

samedi 7 mars 2020

La FSU et la CGT de l’Université de Lille ont pris connaissance de l’ordre du jour de ce congrès des conseils et du document fourni. Elles regrettent que, contrairement à ce qui avait été initialement annoncé, le projet de loi de programmation pluri-annuelle pour la recherche (LPPR) ne figure pas à l’ordre du jour. En effet, le rapport qui sert à préparer cette loi [1] a un lien évident avec le projet d’établissement expérimental présenté ce jour.

Le fil conducteur commun aux deux est la promotion de l’excellence, mot magique auquel s’opposer expose à se faire taxer de promoteur de la médiocrité, mais destiné en réalité à pulvériser les structures de service public et les statuts des personnels. Il s’agit de ramener au niveau des individus la responsabilité d’atteindre le nirvana, à savoir l’excellence reconnue moralement et financièrement, ou de « végéter dans la médiocrité ». En faisant fi, bien sur, des conditions plus ou moins favorables dans lesquelles les individus sont placés par le hasard de la naissance ou des choix plus ou moins éclairés qu’il leur a fallu faire à certains moments.

C’est aussi cette idéologie de l’individualisation exacerbée qui porte la réforme des retraites, à laquelle s’opposent la FSU et la CGT, parce que cette réforme aura pour effet d’augmenter à la retraite les inégalités de la vie active, qui se traduiront dans le total des points accumulés. Les plus pénalisé·es sur le montant de leur pension seront celles et ceux qui ont rencontré le plus de difficultés dans la vie active. Probablement leur dira-t-on que cela relevait de leur responsabilité individuelle de faire mieux au moment opportun ?

Tout comme le gouvernement prétend améliorer le système de retraites avec sa contre-réforme ou celui de la recherche avec la LPPR, les élites éclairées à l’origine du document présenté ce jour prétendent améliorer le fonctionnement de l’enseignement supérieur dans la métropole lilloise et la situation des personnels et étudiants de ce nouvel Établissement Proprement Éléphantesque. Le document propose pour désigner ce dernier l’acronyme EPE, mais trouvant que la prononciation de cet acronyme conduit à dire « leupeu », ou « lépeu », ce qui sonne réducteur et donc mal adapté aux ambitions qui le fondent, ou « lépé » ou « lépè », ce qui semble dangereux ou ridicule, nous dirons ici l’EPEX, pour ne pas oublier la dimension de prétention à l’excellence qui en est le prétexte, et a déjà accouché des acronymes LABEX, EQUIPEX, IDEX...

L’objectif de la création de cet EPEX est clairement annoncé en page 4 du document : il s’agit de ne pas perdre la dotation I-site, laquelle a été péniblement obtenue après moult candidatures à l’IDEX initialement visé et après de nombreuses restructurations annoncées comme indispensables pour l’obtenir, parmi lesquelles la création de la COMUE comprenant un établissement privé mis à égalité avec les établissements publics, la fusion des universités lilloises et, plus récemment encore, les multiples regroupements de composantes.

Pourtant, l’ensemble des personnels et étudiants de notre université peut constater au quotidien les difficultés et aberrations engendrées par la fusion au forceps des universités lilloises et les regroupements internes (facultés). Les suppressions de postes pour compenser les surcoûts de la fusion et les dotations de fonctionnement insuffisantes sont là pour témoigner également de la précarisation de nos métiers. Seul·es quelques privilégié·es désignées comme excellentes et excellents bénéficient actuellement vraiment de la dotation I-site, au prix de surcroît de l’augmentation du nombre d’appels à projets auxquels il faut répondre afin d’avoir de l’argent pour pouvoir faire correctement son travail...

Le récent rapport de l’inspection générale [2] pointait une fusion des universités lilloises mal préparée et mal anticipée :" un manque de visibilité et de lisibilité", " des lourdeurs administratives", "une centralisation accrue", "une perte de proximité de l’équipe de direction ","un manque d’implication et d’association des acteurs à la construction de la décision", peut on y lire.

Comment donc croire encore avec ce projet d’EPEX que nous améliorons la situation en augmentant encore le nombre d’étudiants, et en réduisant la représentativité des instances ? Comment croire à cette théorie du ruissellement universitaire, qui prétend qu’en améliorant la situation des excellents, on aura des retombées un jour pour le vulgum pecus, sans l’exploitation duquel le système ne saurait fonctionner en réalité ?

Rempli de promesses d’un avenir radieux, qui n’engagent que celles et ceux qui y croiront, le document présenté aux conseillers ne saurait convaincre que des esprits dénués de tout sens critique, ce qui n’est normalement pas le cas des personnels universitaires, et en tous cas pas celui des élu·es FSU et CGT.

Notre souci des conditions de travail et du service public nous conduit à nous opposer à cette énième restructuration, dont les principaux effets pour toutes et tous seront le développement de la concurrence entre les individus et l’éloignement supplémentaire entre les dirigeants et personnels, engendrant des aberrations de fonctionnement, donc la baisse de qualité du service public et la perte de sens du travail de ses agents. Ces éléments sont source de la souffrance au travail qui ne fait qu’augmenter dans les personnels de toutes catégories et fonctions depuis plusieurs années, malgré les alertes répétées de la FSU, de la CGT et d’autres organisations syndicales.


Voir en ligne : l’analyse plus détaillée du document "principes et engagements" fourni aux membres des conseils


[1Pour en savoir plus, voir par exemple ici ou

[2juin 2019, non rendu public. Nous contacter pour plus d’informations