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Le droit de grève et l’annualisation des services d’enseignement

Quel est impact d’une journée de grève sur le calcul du service d’enseignement dû ?

jeudi 2 février 2023

Le SNESUP-FSU préconise d’exiger que le service dû à la date de la grève soit considéré comme fait, quel que soit le nombre d’heures d’enseignement qui étaient prévues ce jour-là [1], à partir du moment où vous avez été recensé⋅e comme gréviste et subissez donc une retenue sur traitement pour service non fait.
C’est aussi la réponse qu’a donnée la direction de l’université le 31 janvier 2023 (voir ci-dessous), traduite dans la note de service de l’université de Lille sur le recensement des grévistes et les modalités de retenue sur traitement en cas de faits de grève diffusée aux composantes et organisations syndicales en février 2023

Remarque : En toute rigueur juridique, ceci n’est possible que si les procédures d’attribution des services ont été correctement effectuées. Voir la fiche pratique sur les modalités d’attribution des services d’enseignement

Dois-je rattraper mes cours après la journée de grève ?

Non, il n’y a aucune obligation, puisque vous serez en théorie pénalisé⋅e. Vous seriez sinon pénalisé⋅e financièrement tout en faisant l’intégralité de votre service, ce qui revient à nier le droit de grève ! Si vous le faites cependant, pour des raisons pédagogiques, avec l’accord des responsables de formation, vous êtes en droit d’exiger que des heures complémentaires vous soient payées pour cela, puisque les heures non faites pour faits de grève ont déjà donné lieu à retenue sur salaire.
Si votre présence au poste prévue le jour de la grève était une surveillance d’examen, le cas fait partie des nombreuses questions sans réponse liées aux effets pervers de l’annualisation des services, que le SNESUP-FSU dénonce. La question est de savoir si la surveillance d’épreuves constitue ou non une obligation de service (pas de jurisprudence du Conseil d’Etat), voir ci-dessous.

Comment cela s’articule-t-il avec les heures complémentaires ?
Là non plus, il n’y a aucune réponse dans les textes réglementaires ou les circulaires ministérielles. Le principe des heures complémentaires est d’être payées uniquement sur service fait. Mais le problème est qu’il est difficile de distinguer une heure d’enseignement statutaire d’une heure d’enseignement complémentaire dans une journée de service d’enseignement. On retombe là sur tous les problèmes d’absence de référence horaire journalière ou même hebdomadaire pour le service statutaire qu’entraîne l’annualisation des services. Diverses méthodes (calendaire, proportionnelle) sont préconisées par la circulaire de 2012 sur les congés, aucune n’est satisfaisante et cette circulaire n’aborde pas le cas des journées de grève…Voir la fiche pratique du SNESUP sur ce sujet

Quid des examens ?

Un certain flou règne sur l’obligation statutaire des EC et E à surveiller les examens. Pour les enseignant⋅es-chercheur⋅euses (EC), l’article 7 du décret 84-431 indique que « Ces services d’enseignement s’accompagnent de la préparation et du contrôle des connaissances y afférents. ». Le contrôle des connaissances n’est défini précisément nulle part. Pour les enseignants de statut second degré (E), aucun texte non plus ne précise cela. S’il paraît évident que la préparation du sujet d’examen et la correction des copies en fait partie (ou l’interrogation orale, si c’est ainsi que les connaissances sont contrôlées) en raison des qualifications particulières que cela requiert, il n’est pas évident que cela aille jusqu’à la surveillance de salle (impossible à réaliser seul⋅e par exemple lorsqu’il y a plusieurs salles pour un même examen en raison des effectifs d’étudiant⋅es).
La circulaire de 2018 du MESRI sur le droit de grève des EC interprète cette notion de manière extensive en affirmant que la surveillance d’examens (et la transcription des notes) en font partie. Mais il ne s’agit que d’une circulaire, à la légalité encore plus douteuse que celle de 2003. Si une administration prétend retirer des trentièmes pour défaut de surveillance d’épreuves écrites, il faut demander la production du texte fondant une telle prétention : faute de pouvoir en produire, il y a de fortes chances qu’elle renonce à procéder au retrait.

Précisons que toute obligation statutaire de service non accomplie sans justification recevable est susceptible de donner lieu à la retenue sur le traitement : absence à un jury, à une soutenance, rétention des notes, etc.


Réponse de la direction de l’université en date du 31/01/2023

Bonjour Monsieur,

La circulaire DGRH A1-2 du 7 mai 2018 relative aux dispositions applicables aux enseignants-chercheurs en cas de grève et d’absence de service fait indique que " l’absence de service fait doit se traduire par une retenue sur salaire pour chacune des missions pour lesquelles l’absence du service fait peut être constatée, c’est-à-dire lorsqu’elle porte sur des activités programmées de façon calendaire, notamment celles exercées en présentiel (cours, TP, TD, surveillance examens, auditions, etc.) et dont le calendrier prévu coïncide avec une période couverte par un préavis de grève."

Par ailleurs, l’article L711-3 du code général de la fonction publique précise que "L’absence de service fait, pendant une fraction quelconque de la journée, donne lieu à une retenue dont le montant est égal à la fraction de la rémunération frappée d’indivisibilité en vertu de la réglementation prévue à l’article L. 711-1, à l’exception de ses éléments alloués au titre des avantages familiaux ou des sommes allouées à titre de remboursement de frais.
Les dispositions du présent article sont applicables aux seuls agents publics de l’Etat déclarés grévistes."

Dès lors, un enseignement non réalisé donne lieu à une retenue pour absence de service fait par application des dispositions précédentes.

En revanche, cet enseignement non réalisé doit effectivement être décompté du service annuel de l’enseignant concerné au risque, comme vous l’indiquez, d’aboutir à une "double peine".

Par exemple, le service non fait pour une heure de TD prévue durant une journée de grève donnera lieu à une retenue d’un trentième de la rémunération mensuelle. Dans le même temps, le service annuel d’enseignement de l’intéressé doit être diminué de l’équivalent d’une heure TD. Dans le cas contraire (non recalcul du service annuel d’enseignement et cours rattrapé ultérieurement), cela aboutirait effectivement à ce que l’enseignant subisse une retenue sur salaire pour service non fait alors même qu’il aura bien au final assuré son service complet.

Pour votre parfaite information, pour ce qui concerne les personnels BIATSS, une régularisation KELIO est effectuée a posteriori par le bureau du temps de travail. Les agents pour lesquels une retenue de salaire est faite se voient appliquer le motif "ABS" sur le jour ayant donné lieu à retenue sur salaire. Dans l’attente de cette régularisation, les agents apparaissent provisoirement avec un solde négatif qui sera annulé dès que la régularisation sera faite.


Voir en ligne : Plus d’infos sur les droits des personnels


[1comme c’est le cas pour les enseignants des lycées et collèges