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LPR : la LPPR en pire !

samedi 21 novembre 2020

Loi de programmation pour la recherche (LPR) : une loi scélérate qui bafoue les principes de la franchise universitaire (13e siècle), du recrutement sur concours national (via le CNU, créé en 1945) et de la sincérité budgétaire.

L’avis du Conseil Economique Social et Environnemental (CESE), saisi par le gouvernement sur les orientations stratégiques et la programmation budgétaire pour les années 2021-2030, pose en conclusion la question suivante : « "Peut-on soigner un système avec les outils qui l’ont rendu malade ?". » La réponse semble évidente, d’autant plus en pleine crise du Covid-19 : non ! Et c’est sans doute la raison pour laquelle le texte a été présenté en procédure accélérée en pleine rentrée en "démerdentiel", pour mieux bâillonner les oppositions. (Voir la liste non exhaustive de toutes les motions s’opposant à cette loi recensées par le SNESUP-FSU)

Prenant au sérieux le décryptage réalisé par différents collectifs et syndicats, le CESE critique le manque d’ambition et de sincérité budgétaire d’une programmation (p.8-10) qui fait porter l’essentiel de l’effort sur les deux prochain quinquennats. Il plaide pour un rééquilibrage entre financements de base et financements par projet ainsi que pour un renforcement des crédits de base des laboratoires (p.15). Il invite aussi à renforcer l’attractivité des carrières scientifiques en revalorisant les rémunérations et en recrutant massivement, mais pas n’importe comment, puisqu’il s’inquiète de la contractualisation croissante des emplois scientifiques et défend le statut et le concours de la fonction publique qui garantissent la qualité des missions de service public (p. 17-18). D’où le danger identifié des "tenure track" et "CDI de mission", vus comme "un mode de gestion des carrières, organisé sur la mise en concurrence, qui favorise de plus en plus le mode dérogatoire au recrutement statutaire" (p. 18).

Si l’on n’attendait rien de bon de la majorité LREM de l’Assemblée Nationale qui a adopté le texte, on ne peut qu’être estomaqué de découvrir que la commission sénatoriale puis la commission mixte paritaire ont encore aggravé le texte en introduisant plusieurs « cavaliers législatifs » : notamment l’article 20 bis AA (l’introduction d’un délit très flou de "trouble à la tranquillité ou le bon ordre de l’établissement" passible de 3 ans de prison et 45 000 euros d’amende !) et l’article 3 bis qui permet aux établissements de déroger à la qualification par le CNU pour les candidats aux fonctions de MCF ou Professeurs.
Le texte de la CMP a été définitivement adopté par Le Sénat le 20 novembre 2020 (après l’Assemblée Nationale le 17 novembre). Les sénateurs (SER, CRCE, GEST) opposés à la LPR ont annoncé qu’ils saisiront le Conseil Constitutionnel.

La ministre peut bien partir, briguer un mandat régional, être démissionnée (ce que demande la pétition initiée par la CP-CNU) ou aller se réfugier en Antarctique, elle laisse derrière elle un champ de ruines : sélection à l’entrée de l’université avec Parcoursup, droits différenciés pour les étudiants étrangers (x16 !), numéro vert payant pour les étudiants en détresse, à quoi s’ajoute désormais cette loi scélérate qui fait tellement consensus contre elle qu’elle a été adoptée en procédure accélérée et en pleine pandémie...