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Guerre en Palestine : motion adoptée au CA de U Lille du 8 février

samedi 17 février 2024

Ci-dessous et en pièce jointe à l’article, la motion sur la situation en Palestine adoptée par le CA de l’Université de Lille le 8 février dernier.
Résultat du vote :
Pour : 21
Contre : 1
Abstention : 1
Refus de prendre part au vote : 11

Pour la petite histoire, les élu·es au CA des listes Pour une alternative à l’EPEX (soutenues par l’intersyndicale FSU-CGT-Sud) avaient déposé, le mardi 6 février, dans les délais imposés par le règlement intérieur du CA, une motion sur ce sujet à soumettre au vote (texte de cette motion en dessous de celle adoptée). Il leur a été répondu le 7 février à 18h04 que cette motion ne serait pas présentée au CA au motif qu’elle contrevenait à l’article A20 § 1 du règlement intérieur : « les membres du conseil d’administration peuvent déposer des motions sur tout sujet présentant un intérêt universitaire, et qui relève de la compétence de l’établissement ». Il nous a été indiqué que « plusieurs points de la motion, sur lesquels le conseil d’administration est amené à se prononcer, ne relèvent pas de la compétence de l’établissement ». Or, il aurait bien sûr été possible, comme c’est l’usage lors de l’étude de telles motions, de proposer des modifications substantielles au texte durant le débat, avant de le soumettre au vote. Le motif invoqué pour ne pas mettre cette motion à l’OJ du CA ressemblait donc plus à nos yeux à un refus de prendre le risque d’une discussion en CA et d’une expression de l’université de Lille sur un sujet aussi sensible et politiquement clivé.

Nos élu·es avaient évidemment prévu de ne pas en rester là, et d’interpeller le président en CA sur ce refus, en lui rappelant ce qu’il avait écrit dans le message qu’il avait adressé le 1er mars 2022 à tous les personnels, pour les inviter à participer à une minute de silence suite à l’invasion de l’Ukraine par la Russie, à savoir :

« Une université pèse sans doute peu au plan géopolitique et géostratégique, ce qui pourrait faire paraître dérisoire notre rassemblement. Pourtant, la voix des universitaires est essentielle, car elle est seule capable de porter l’expression de la vérité historique, de la critique constructive et de la confrontation scientifique, qui dépassent les conflits militaires, idéologiques ou nationalistes ».

Il faut croire que la nuit a porté conseil à l’équipe de direction, qui s’est peut-être aussi souvenue de ce message du 1er mars 2022. Toujours est-il que le lendemain en CA, le président a ouvert la possibilité de discuter d’une motion sur le sujet de la Palestine, en précisant qu’il trouvait très bien celle adoptée par l’Université Lyon 2. Notre élu Thomas Alam l’a pris au mot et a travaillé en séance avec le VP en charge des Affaires Institutionnelles, Etienne Peyrat, pour proposer un texte inspiré de la motion de l’Université Lyon 2 qui, après quelques modifications, a été mis au vote et adopté.

Evidemment, nous regrettons l’absence de référence à la politique de colonisation et au régime d’apartheid qui rendent impossible la solution à deux Etats, seul moyen de parvenir à une paix durable. Mais pour nous, l’essentiel est ailleurs : le silence assourdissant des universitaires était devenu insupportable. Encore plus, depuis le jugement du 26 janvier 2024 rendu par la Cour de Justice Internationale – saisie en urgence par l’Afrique du Sud pour violation par Israël de la Convention des nations Unies sur le génocide signée en 1948 après l’Holocauste - qui a reconnu le risque plausible de génocide.

Les administrateurs et administratrices de l’université de Lille, en dehors des représentants des tutelles qui n’ont pas pris part au vote, se sont ainsi jugés compétents pour débattre de la politique menée par la coalition d’extrême droite au pouvoir en Israël et pour adopter une expression publique attendue avec impatience par la communauté universitaire lilloise. Ils et elles ont osé demander un cessez-le-feu permanent, un état des lieux des collaborations académiques en cours avec la Palestine et Israël et à ce que l’université fasse de la solidarité avec nos collègues durement touchés une priorité de sa politique de Relations Internationales.

Texte de la motion adoptée au CA du 8/2/2024

Motion du Conseil d’administration de l’Université de Lille sur la situation humanitaire au
Moyen-Orient

Le Conseil d’administration de l’Université de Lille exprime sa pleine solidarité envers tous les membres de la communauté universitaire, étudiant.e.s comme personnels, touchés, d’une manière ou d’une autre, par les tragédies qui frappent actuellement les communautés israéliennes, palestiniennes et libanaises, dans l’esprit de la résolution adoptée par l’Assemblée générale de l’Organisation des Nations Unies, le 27 octobre 2023 « sur la protection des civils et le respect des obligations juridiques et humanitaires ».
Israël, la Palestine et le Liban sont la proie d’évènements tragiques et de combats destructeurs. Le nombre de victimes causées par ce nouveau cycle de violence dépasse l’entendement. Selon l’UNICEF, au 7 février 2024, on comptait, en Israël au moins 1 200 personnes tuées, dont 36 enfants et plus de 7 500 blessés. A Gaza, le nombre de décès s’élève déjà à plus de 26 000 morts, dont 70% de femmes et d’enfants, sans compter plus de 7000 disparus sous les décombres. En Cisjordanie 367 personnes ont été tuées depuis le 7 octobre (dont 98 enfants) auxquelles s’ajoutent les 208 personnes tuées entre le 1er janvier et 6 octobre 2023.
La riposte militaire israélienne dans la bande de Gaza y est à l’origine d’une catastrophe humanitaire depuis l’automne, en raison de la destruction des infrastructures économiques, sanitaires et hospitalières, déjà lourdement fragilisées par des années de blocus et d’opérations militaires antérieures. L’éducation, elle aussi, a été dévastée. Au moins 346 structures scolaires, dont plus de 50 gérées par la United Nations Relief and Works Agency (UNRWA), ont été bombardées. Au 18 janvier, plus de 4 000 étudiant.e.s et 231 enseignant.e.s ont été tué.e.s, du fait de la destruction des universités et établissements hospitaliers de la bande de Gaza. Le patrimoine historique et culturel est lui aussi ravagé tandis que les déplacements massifs de population (jusqu’à 1,9 millions de personnes, soit 85% de la population totale) paralysent toute activité d’enseignement depuis près
de 4 mois.
Face à une telle situation, le Conseil d’administration de l’Université de Lille se joint aux appels à un cessez-le-feu immédiat et permanent à Gaza, en Cisjordanie, en Israël, au Liban et dans l’ensemble de la région. Il réaffirme sa condamnation de toute violence commise à l’encontre de civils désarmés. Il réaffirme sa ferme condamnation des tortures et violences sexuelles qui accompagnent ces tueries. Il réaffirme l’égale dignité de la vie humaine indépendamment de toute nationalité, culture ou religion. Il appelle à la libération et au respect de l’intégrité morale et physique de l’ensemble des prisonniers politiques palestiniens et des otages israéliens retenus à Gaza.
Il condamne tout particulièrement la mort de nombreux étudiant.e.s, personnels des universités et enseignant.e.s- chercheur.e.s, ainsi que les atteintes aux infrastructures et installations éducatives et universitaires. Le Conseil d’administration de l’Université de Lille tient à réaffirmer que l’éducation est un droit humain fondamental, consacré notamment par les articles 28 et 29 de la Convention internationale des droits de l’enfant. Elle est aussi indispensable à la préservation de l’identité, du patrimoine et de la vie civique d’un peuple.
Le Conseil d’Administration de l’Université de Lille appelle l’Etat français à faire tout son possible pour que les mesures d’urgence prononcées par la Cour Internationale de Justice concernant la situation en Israël et Palestine soient mises en œuvre.
Le Conseil d’Administration souhaite par ailleurs disposer d’ici la fin de l’année universitaire d’un état des lieux et d’une évaluation des partenariats en cours avec les universités et institutionsisraéliennes et palestiniennes respectivement. L’Université de Lille s’engage à manifester sa solidarité avec les institutions, en particulier palestiniennes touchées par les violences, par le biais d’initiatives scientifiques et pédagogiques, de l’accueil de collègues et d’étudiants, ainsi que des dons de matériel et d’équipement.

Texte de la motion initialement proposée proposée par les élu⋅es des listes Pour une alternative à l’EPEX, non soumise au vote

Les attaques du 7 octobre 2023 ont suscité un grand effroi, par la violence des actes commis, que l’Université de Lille condamne. Toutefois, la réponse apportée par l’État d’Israël a entraîné à ce jour le décès de plus de 26000 personnes à Gaza, dont 70% de femmes et d’enfants. Des milliers de personnes sont portées disparues. Plus de 66000 personnes ont été blessées.
La situation des Gazaoui⋅es est dramatique : 2,2 millions de personnes ont besoin d’une aide humanitaire, 2/3 des hôpitaux ne fonctionnent plus, 90% de la population est en situation d’insécurité alimentaire aiguë. L’Unicef estime que la bande de Gaza est aujourd’hui l’endroit le plus dangereux au monde pour un enfant. Le conseil d’administration de l’université de Lille condamne la violation injustifiable des droits humains de la part du gouvernement israélien. Le jugement rendu le 26 janvier 2024 par la Cour de Justice Internationale – saisie en urgence par l’Afrique du Sud pour violation par Israël de la Convention des nations Unies sur le génocide signée en 1948 après l’Holocauste - a reconnu le risque plausible de génocide, en ordonnant à Israël de prendre des mesures conservatoires visant à protéger le peuple palestinien d’« un risque réel et imminent d’un préjudice irréparable ». Il est urgent que la communauté internationale agisse fortement pour empêcher que ce risque ne se réalise et pour que la décision de la CIJ soit appliquée. Il faut également agir pour éviter l’extension du conflit dans les zones limitrophes.
Le Conseil d’Administration de l’université de Lille s’associe aux nombreuses voix françaises et étrangères qui appellent à un cessez-le-feu immédiat et au respect du droit international en Palestine. Il invite également France Universités à avoir une expression à la hauteur de la catastrophe humanitaire en cours.
Depuis le 17 janvier 2024, il n’y a plus une seule université qui n’ait pas été détruite à Gaza. La communauté universitaire lilloise tient à apporter son soutien à ses confrères et consœurs académiques, à leur exprimer son respect et son admiration pour toutes les initiatives qu’ils et elles mettent en œuvre pour poursuivre leur activité scientifique et pédagogique, malgré le contexte dramatique, et condamne les agissements du gouvernement d’Israël qui, en détruisant délibérément les universités, écoles, musées, bibliothèques, mosquées, églises, cimetières, détruit aussi toute forme de culture et d’éducation. Elle condamne de surcroît la colonisation des terres palestiniennes et la situation d’apartheid que subissent les palestiniens depuis plus de 75 ans. Le Conseil d’Administration souhaite par ailleurs disposer sans tarder d’un état des lieux et d’une évaluation des partenariats en cours avec les universités et institutions israéliennes et palestiniennes respectivement.
Une fois que la raison l’aura emporté, l’Université de Lille s’engage fermement à apporter un soutien total à la communauté universitaire et aux institutions d’enseignement supérieur palestiniennes. Cette assistance se manifestera à travers divers moyens tels que des collaborations scientifiques et pédagogiques, l’accueil de collègues et d’étudiants, ainsi que des dons de matériel et d’équipement. Ces initiatives seront placées au cœur de la politique de Relations Internationales de l’université.