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Le repyramidage à ULille : mode d’emploi et évolutions

vendredi 9 juin 2023

Le repyramidage c’est quoi ?

Le repyramidage est une voie temporaire d’accès au corps des professeur·es des universités. Cette voie concerne les maître·sses de conférences habilité·es à diriger des recherches et soit ayant 10 ans d’ancienneté, soit étant hors classe. La promotion se fait dans l’établissement d’origine. Cette voie temporaire, initialement prévue pour la période 2021-2025, mais étendue a priori jusqu’en 2027, est censée résorber le déséquilibre criant entre les corps de MCF et de PU, surtout si on s’intéresse plus particulièrement aux femmes. Cependant, c’est bien connu, l’enfer est pavé de bonnes intentions.

Notre analyse syndicale

Le SNESup-FSU, qui demande un repyramidage massif de longue date, considère le nombre de promotions bien insuffisants : 1600 sur 4 ans dont 74 pour l’Université de Lille. Pas de quoi permettre d’atteindre l’objectif de 40 % de femmes professeures (actuellement 31 % à ULille).

De plus, l’existence d’objectifs nationaux mais d’une gestion locale (autonomie oblige), donne toute latitude au président. En effet, c’est lui seul qui décide, in fine, de qui bénéficie du repyramidage, « éclairé » par les avis des différentes instances. Dès lors, c’est un sentiment d’opacité qui domine, tant la procédure locale favorise cette opacité. Pour nous, cela fait craindre un usage clientéliste du dispositif. C’est pourquoi, à l’Université de Lille, nous nous sommes efforcé·es de veiller à ce que la procédure soit la plus transparente possible. Pour l’heure, ça n’a pas vraiment marché…

À ULille, des craintes plus que fondées

Après la répartition des supports par le Ministère entre établissements, le CA répartit ceux-ci entre les sections CNU. La part de PU doit être, dans la section, inférieure à 40 % (31 % à l’échelle de l’université) et le vivier doit être suffisant (au moins 2 candidat·es).

Les collègues des sections concernées peuvent ensuite candidater sur Galaxie. Le Conseil académique restreint aux professeur·es désigne ensuite 2 rapporteur·ices dont l’un·e au moins est choisi·e parmi les spécialistes de la discipline des candidat·es. Or, l’Université a été, pour certain⋅es candidat·es, très loin de l’objectif visé, le vivier local étant réduit à peau de chagrin (en particulier en santé) et les conflits d’intérêt excluant d’office plusieurs collègues. À aucun moment, les élu·es du conseil académique restreint n’ont pu obtenir que soit sollicité un vivier extérieur pour pallier à ces manques, sous prétexte que le CNU allait remédier aux incompétences des rapporteur·ices locaux·ales. À l’avis du Conseil académique restreint, l’Université de Lille a préféré ajouter un avis du conseil restreint de la composante concernée, élargi au ou à la directeur·ice de l’unité de recherche de laquelle relèvent les candidat·es, signe des nouveaux pouvoirs accordés aux composantes en matière de gestion des carrières. Si cela pouvait combler le manque d’avis de spécialistes de la discipline, la procédure utilisée dans chaque composante n’a pas été transmise au conseil académique restreint, bien que les évaluations ont été intégrées dans la décision finale. Il est bien évident que les conseils restreints des composantes et directeur·ices d’unités n’ont aucun conflit d’intérêt avec les candidat·es...

Les avis locaux, entachés soit de méconnaissances, soit de conflits d’intérêt, sont restés bien évidemment dans le dossier des candidat·es et ont pu influencer leur possible sélection pour le comité d’audition. En effet, après l’avis du conseil académique restreint, de la composante et du CNU, le comité d’audition et Président ont déterminé, pour chaque poste, les 4 candidat·es maximum qui pouvaient être auditionné·es.
La composition même de ces comités d’audition interroge. Composés de 4 membres, ils ont été présidés par des vice-président·es comme le prévoient les directives ministérielles (VP qui jugeaient sans doute en pleine indépendance… par rapport à la politique de la Présidence). De plus, le choix des autres membres se faisait sans régulation extérieure si ce n’est l’obligation d’au moins deux membres choisis parmi les spécialistes de la discipline concernée, ce qui est assez large puisque la discipline a été prise dans son acception de « Section CNU » par l’Université de Lille. On a ainsi vu des membres de comité reconnaître leur incompétence et des MCF qualifié·es aux fonctions de professeur·e évincé·es sous prétexte d’une faible aptitude professionnelle aux fonctions de professeur·e.

Il est dès lors aisé de faire du repyramidage une voie « politique » de promotion en en téléguidant les résultats, d’autant que la décision revient au Président, « éclairé » des différents avis, y compris celui du CODIR.

Une nouvelle procédure qui ne règle pas le fond du problème

L’usine à gaz de l’année dernière a été simplifiée par un décret. L’insuffisance du vivier dans certaines sections (moins de 2 promouvables) peut être compensé par une sélection à l’échelle de deux sections CNU du même groupe : toutefois, en 2023, toutes les sections qui auraient dues être concerner n’ont pas pu bénéficier d’un regroupement (faute d’autre section pouvant bénéficier du repyramidage dans leur groupe).
Les dossiers sont directement évalués par les sections compétentes du CNU. Ensuite, l’Université organise des comités de promotion. Le conseil académique restreint a pour mission de désigner les président·es et les membres de ces comités, qui peuvent être extérieur·es à l’établissement. Chaque comité compte a minima quatre membres, en plus de son ou sa président·e, dont au moins deux membres de chaque discipline pour laquelle une ou plusieurs candidatures ont été déclarées recevables et au moins deux membres extérieur·es à l’université. Un objectif de 40 % de membres femmes est indiqué, sans qu’il soit toutefois contraignant. La composition du comité de promotion est rendue publique avant le début de ses travaux. L’Université de Lille a toutefois choisi de poursuivre la voie « politique » en faisant nommer des VP aux présidences des comités de promotion, le plus souvent hors des sections CNU auxquelles appartiennent les candidat·es. Or, ce sont les président·es de comité qui proposent au conseil académique restreint les autres membres des comités de promotion : il est ainsi aisé de construire des comités « sur mesure ». Simplifiée, la procédure n’en reste ainsi pas moins problématique.


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